Le jeudi est le jour où je peux travailler toute la journée. Mais cette semaine je ne suis pas en train. Ça a commencé par un bel article de Philippe Lançon dans Libération sur le livre d’Edouard Levé (Suicide, chez P.O.L.). (J’aimais bien les photos d’Angoisse.) Suivi, alors que je m’échappais de l’atelier sous prétexte d’acheter du papier carbone (oui, on en trouve encore à Calais) par une citation d’Un siècle débordé de Bernard Frank sur France Culture, qui m’a gentiment envoyé dans les cordes. L’émission est podcastable là pendant un mois. Je sais en plus que cette après-midi ne sera pas travaillée non plus, mon bon ami Nicolas dont le site est dans le blogroll a invité Michel Haas dans son Eroa et je suis de la partie.
Tout ça pour parler de clôture. J’avais dans l’idée de fabriquer la barre de gauche et je me suis dit que j’allais « fermer » le panneau. Ça m’a rappelé la scène de Printemps, été, automne, hiver et… printemps de Kim Ki-duk où le moine, avant de s’immoler, se recouvre les yeux, la bouche, et les oreilles de papiers sur lesquels sont tracés les kana correspondant au mot « fermé ».
Tout ça n’est pas très gai mais me donne une piste pour la « fermeture » du panneau droit, avec le petit joueur Bonzini®. Voilà comment je vois la chose. Un volume à trois pans donnant une profondeur à l’arrière du cadre. Suspendu à son axe, le joueur se trouve dans la partie haute, le tout fermé sur le devant par une vitre.
Je voudrais doubler ça d’un dispositif électronique. Il serait composé de trois éléments. Un capteur de présence (ou encore mieux d’absence) de spectateur, un ordinateur équipé du logiciel Pure Data qui en fonction des signaux émis par le capteur mettrait en branle un petit cerveau-moteur qui actionnerait notre joueur et le ferait taper au carreau.
Les obstacles ne sont pas techniques : j’ai déjà plusieurs formations à mon actif sur ce genre de dispositif et je pense pouvoir compter sur le Centre de Ressources Art Sensitif de « Mains d’œuvre » de St-Ouen pour m’aider à la mise en place. Mais je crains de faire basculer l’œuvre dans un autre registre que celui sur lequel je veux la tenir en permettant à un des éléments de représentation du dispositif d’effectuer une opération réelle.
Suite….
La séance avec Michel Haas a été très bien. Nous avons visionné un petit film monté par Nicolas où M.H. explique comment il travaille. Il dessine au fusain sur une feuille et la mouille puis la gratte jusqu’à ce que le papier n’en puisse plus. Alors il colle sur le verseau une feuille neuve et il recommence. Au bout d’un moment le travail prend une épaisseur importante (il peut rester plusieurs mois sur un dessin).
Duchamp appelait les tableaux des « retards ». Je me demande si ça a à voir avec cette espèce de constante stratégie de perte de temps.
J’ai contacté Bonzini® pour avoir un modèle 3D de joueur, afin de faciliter la tâche de Joël qui va me réaliser la matrice pour la pâte de verre. J’ai aussi commencé une série de dessins aux crayons de couleur en préparation du prochain travail qui sera, j’en ai fort envie, très graphique.
J’ai tout de même « fermé » le panneau gauche.
2 réflexions sur « (VIII) Pourvu, pourvu qu’on ait l’ivresse ! »